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Des gardiens de prison grévistes qui se mettent en congé maladie pour percevoir leur salaire complet: info ou intox ?

Des gardiens de prison grévistes qui se mettent en congé maladie pour percevoir leur salaire complet: info ou intox ?
 

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Depuis le 25 avril dernier, un mouvement de grève touche nombre de prisons du pays. Des centaines d'agents pénitentiaires ne travaillent plus. Ils perçoivent donc une indemnisation syndicale qui compense en partie l'absence de salaire pour chaque jour de grève. Pas suffisant pour certains qui n’hésiteraient pas à se mettre en congé maladie pour pouvoir toucher la totalité de leur salaire. Est-ce exact? Notre journaliste a tenté d'obtenir une réponse.

"Beaucoup d'agents pénitentiaires faisant grève en ont marre de perdre de l'argent. Du coup, ils se mettent sous certificat médical. Ils touchent donc plus d'argent en étant malades qu’en étant payés par les syndicats", nous écrit une personne via le bouton orange Alertez-nous. Et il ajoute: "Ils dénoncent l'injustice, mais sont eux même coupables d'injustice en trichant."


Richard Fournaux, bourgmestre de Dinant dénonce une "supercherie invraisemblable"

Direction la prison de Dinant. La grève concerne 38 agents sur 41. Le bourgmestre de la ville, Richard Fournaux, fulmine et pointe du doigt "des personnes en maladie" qui abondent depuis le début du mouvement de grogne. Selon le maïeur, la grève des agents pénitentiaires a déjà coûté 50.000 euros à Dinant pour les heures supplémentaires prestées par les policiers. "La moitié fait grève, l'autre s'est mise en maladie. Suppléer des gens en maladie n'est pas dans nos habitudes", lâche le bourgmestre. Il va jusqu’à dénoncer une "supercherie". "Qu’on soit d’accord ou pas avec les motifs de la grève, c’est invraisemblable".


Le directeur de la prison de Dinant: "La majorité des malades le sont depuis la grève, c’est juste"

Au téléphone, le bourgmestre nous dit tenir l’information d’un fonctionnaire de la prison. Nous contactons la direction de la prison de Dinant. Elle nous confirme effectivement un nombre plus important de malades en cette période de grève: "La majorité des malades le sont depuis la grève, c’est juste", constate-t-il.

Mais le directeur de la prison de Dinant ne souhaite pas creuser. Pour lui, la priorité n'est pas de savoir qui est gréviste, qui est malade ou qui ne l’est pas. "Le problème ne se situe pas là. Pour l’instant, on s’occupe des détenus. Le souci est que la prison ne fonctionne pas. Mon but est de faire fonctionner mon établissement en toute sécurité. Le reste, ce sont des secondes lignes pour nous. Je ne vais pas dire que l’honnêteté n’est pas nécessaire, mais le problème pour l'instant est le fonctionnement de la prison."


Le directeur de la prison de Marche-en-Famenne: un gardien absent sur trois n'est pas en grève mais malade

A Marche-en-Famenne, la prison est également en grève. Là aussi, même constatation. "Je n’ai pas tenu de statistique jusqu’à présent, car on est débordé. A la louche, je dirai qu’il y a 30% de malades sur les absents", fait savoir Frédéric Delthier, directeur de l’établissement pénitencier. Un absentéisme lié directement au mouvement de grève. "C’est en recrudescence depuis la grève", ajoute le directeur qui conclut: "S’il y a de l’abus, c’est inacceptable. S’ils sont vraiment malades, je n’ai rien à dire."


De 30 euros par jour, le montant passe à 35 à partir du huitième jour

Depuis le début du mouvement de grève, le 25 avril, les agents pénitentiaires sont couverts par leur syndicat. Ils ont touché 30 euros par jour pour les huit premiers passés. Depuis ce huitième jour, le montant est passé à 35 euros. Un montant fixe, quelle que soit la couleur syndicale. Mario Parlapiano est président régional des prisons du Hainaut pour la CSC. Il travaille à la prison de Mons. Il précise sur les indemnités: "Les agents pénitentiaires ne sont pas obligés de se rendre devant la prison tous les jours. A la fin du mouvement, ils reçoivent une fiche et doivent simplement la compléter." Le montant est ensuite versé sur le compte des grévistes. Des malades au lieu de faire la grève ? Le président régional préfère botter en touche. "Je ne sais pas vous le dire car je n’ai pas accès à la feuille de services. Je n’entre pas à la prison pour le moment, donc impossible de savoir le nombre de malades."


Il faudra attendre la fin de la grève lorsque les agents devront justifier leur absence

Au fédéral, l’administration pénitentiaire qui dépend du ministère de la Justice dit avoir eu vent de ce phénomène d’absentéisme sans pour autant pouvoir le confirmer avec des chiffres précis. D'autant que la grève se poursuit. Kathleen Van De Vijver est la porte-parole de l’administration pénitentiaire. "On ne saurait le dire pour le moment. C’est véritablement à la fin de la grève que nous pourrons le savoir. Les agents absents devront justifier leur absence quand ils reprendront leur travail". Dans le passé, le SPF Justice n’a pas remarqué une absence plus importante pour cause de maladie de la part de ses agents. "Nous n’avons jamais eu un mouvement de grève de cette ampleur donc c’est difficilement vérifiable dans le passé." Kathleen Van De Vijver préfère rappeler la procédure d’usage. "Quand quelqu’un est malade, c’est au directeur de la prison, s’il a un doute, de prévenir l’organe de contrôle."


"On ne roule pas sur l'or"

Nicolas est agent pénitentiaire dans une prison hennuyère. Sous couvert d’anonymat, il nous apporte une autre explication à cet absentéisme. "C’est dur de travailler dans une prison par ces temps-ci. Les agents pénitentiaires ne fraudent pas, mais ils tombent malades, car les grévistes sont absents de l’établissement. Du coup, il y a plus de travail pour eux. Dans ces conditions, impossible de travailler". Nicolas raconte que si certains se mettent en congé maladie durant une grève, c’est aussi par manque de moyens financiers. "On ne roule pas sur l’or et on perd de l’argent même en étant grévistes." Quand on lui soumet l’éventualité que des syndicats invitent leurs membres à se porter malade pour éviter de les indemniser et pour qu’ils touchent plus d’argent, la réponse laisse place au doute: "Ça peut se faire, mais c’est un sujet tabou …"

UNE GREVE QUI N'EN FINIT PAS

Pour rappel, une action de grève au niveau national a été lancée le lundi 25 avril 2016 à 22h00 et devait normalement durer 32 heures. La concertation sociale n'ayant pas abouti, le mouvement de grève a été maintenu depuis lors. Dans le cadre de l'ajustement budgétaire, le ministre de la Justice Koen Geens compte réaliser une économie de 1,5% dans les centres de détention sur la législature. Le personnel devra notamment travailler en cinq shifts, contre trois précédemment. Tant la FGTB-CGSP que la CSC avaient déjà mené des actions en décembre à ce sujet. Après ces mouvements, le ministre Geens avait promis l'engagement de 54 personnes. Mais les syndicats les attendent toujours. La prime de flexibilité, destinée à compenser une perte de salaire, est également toujours attendue. Le personnel a par ailleurs de plus en plus de difficultés à prendre ses congés en raison de la réduction du nombre de travailleurs. S'ils étaient 9.295 en 2014, ils doivent passer à 8.366 en 2018 (-10%).


 

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