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Plusieurs fois par an, Marie voit des gens du voyage s'installer dans sa rue à Gosselies: "Ils ne respectent rien"

Plusieurs fois par an, Marie voit des gens du voyage s'installer dans sa rue à Gosselies: "Ils ne respectent rien"
 
 

Une habitante de la rue de Roux, à Gosselies, nous a contactés via le bouton orange Alertez-nous lorsqu'elle a vu des gens du voyage s'installer, en mars, juste à côté de chez elle, sur un terrain inoccupé, mais sécurisé par des barrières. Si Marie a réagi si promptement, c'est que ce n'est pas la première fois que la communauté s'installe dans la rue. "On les a quatre ou cinq fois sur l'année. Ils reviennent régulièrement après quelques mois", a-t-elle confié.

Les gens du voyage ont repéré un terrain appartenant à la société AGC (ex-Glaverbel, fabriquant de verre). Et à chaque fois qu'ils s'y installent, ce serait le même manège. "Ils font un vacarme pas possible. Les klaxons le jour et la nuit, la musique à fond… Ils balancent leurs déchets dans la rue n'importe où. Mon enfant a même aperçu un petit garçon qui faisait ses besoins dehors, à la vue de tout le monde", a décrit Marie. Elle nous a envoyé quelques photos de l'état du terrain et des environs après le passage du groupe.


Scandalisée, elle a bien évidemment contacté la police. Mais les forces de l'ordre semblent bien démunies face à ce genre de situation, tout comme la Ville de Charleroi. Car le terrain est privé, et c'est au propriétaire de lancer des démarches à chaque venue de la communauté. Nous avons contacté chaque acteur pour comprendre le problème et la procédure judiciaire.

Ils se sont acharnés et ont déplacé les blocs de béton

Le terrain pris pour cible par ce groupe de gens du voyage est en réalité un ancien parking de l'entreprise AGC. L'usine de la société, située juste à côté, est à l'abandon depuis son arrêt en juin 2014. "Du matériel et des pièces ont d'ailleurs été vendus", nous a expliqué Benoit Ligot, porte-parole de l'entreprise. Du coup, le parking n'est plus utilisé depuis bien longtemps. "Ils viennent par période. Je pense que c'est la quatrième ou cinquième fois qu'ils viennent. En fait, c'est depuis qu'on n'a plus de gardiennage, c'est-à-dire depuis janvier 2016", a ajouté le porte-parole.

Mais ce n'est pas pour autant que la propriété a été laissée à l'abandon. Bien au contraire. Marie elle-même nous a détaillé les mesures prises par AGC. "La société a déjà tenté de bloquer l'accès avec des blocs en béton, mais les gens du voyage se sont acharnés et ont déplacé les blocs. Puis AGC a mis des portiques, mais encore une fois, ils ont réussi à entrer malgré tout", nous a-t-elle expliqué. Des mesures confirmées par Benoit Ligot: "On a essayé de sécuriser l'entrée, soit avec des plots, des barrières, ou quoi que ce soit… et à chaque fois les mesures de sécurité sont forcées et ils s'installent en petit groupe. Puis le groupe grossit au fil des jours", précise-t-il.

Et donc, à chaque venue des gens du voyage, les habitants de la rue de Roux vivent le même calvaire. "Ils déversent leurs déchets en-dessous du pont des voies de chemin de fer. Ils ne respectent rien, c'est un cauchemar. Ils ont même dégradé la borne électrique. Ça ne met pas en sécurité, nous sommes inquiets à chaque fois", nous a confié Marie.

Ici aussi, Benoit Ligot confirme. "On est alerté par les riverains. Ils se plaignent des dégradations sur les terrains avoisinants, et de l'état de saleté dans lequel les environs se trouvent", nous a-t-il expliqué.

À chaque fois, la police se rend sur place, mais elle reste impuissante pour venir en aide aux riverains.


Une personne de référence à la Ville de Charleroi

Nous avons contacté la Ville de Charleroi. "Il s'agit d'un site privé, donc nous ne pouvons pas faire grand-chose en matière d'expulsion", nous a déclaré Fanny Van Leliendael, attachée de presse du bourgmestre. "Ce que nous pouvons faire, c'est essayer d'atténuer les nuisances. La Ville dispose d'une personne de référence pour les gens du voyage. Le temps de leur présence, elle peut mettre en place certaines choses pour améliorer la situation. Elle peut demander un container pour les déchets, et faire le relais entre les riverains et les gens du voyage en tant que médiateur", a-t-elle expliqué.

Si la police est contactée, elle ne peut pas pour autant expulser aussi facilement les personnes qui occupent illégalement un terrain. "Le propriétaire doit mandater un huissier. Un juge doit ensuite émettre un ordre d'expulsion, et le huissier reviendra, avec le concours des forces de police si nécessaire", a ajouté Fanny Van Leliendael.

Précisons que Charleroi ne dispose pas d'un terrain dédié aux gens du voyage. Selon nos informations, une réflexion serait cependant en cours pour la création d'un tel site.


"La police ne peut pas intervenir elle-même, sauf dans certains cas"

Du coup, nous sommes revenus vers AGC et leur représentant en matière juridique. Benoit Ligot nous a détaillé la procédure lancée à chaque arrivée des gens du voyage. "Le département légal est contacté, puis une demande est faite à un huissier pour aller sur place. Ça peut aller assez vite. En général, la communauté reste jusqu'au moment où elle est délogée, donc une bonne semaine. Mais la première fois elle est restée plus longtemps. Les riverains n'en pouvaient plus", a précisé le porte-parole.

Quand les gens du voyage arrivent à Roux, c'est maître Emmanuel Terlinden qui s'occupe de la procédure d'expulsion. "La police n'a pas la possibilité d'intervenir elle-même, sauf dans certaines situations où il pourrait y avoir des dangers, des agressions ou un risque d'incendie. S'il n'y a pas de flagrant délit ou des risques pour la personne humaine, la police ne peut pas expulser les gens qui occupent le terrain ou une maison. C'est le même principe que pour des squatteurs d'un immeuble", a-t-il détaillé.


La procédure judiciaire: il faut un ordre d'expulsion du juge

"Ici, à chaque fois, on introduit une requête unilatérale devant le tribunal de première instance de Charleroi. On parle de requête unilatérale car on ne sait pas identifier les personnes qui se trouvent sur le terrain. Donc on ne peut pas introduire d'action contradictoire. Dans la requête, on explique qu'il y a urgence, car il y a des nuisances, et qu'il y a un certain danger, du fait de la proximité d'une usine désaffectée", a expliqué Me Terlinden.

Une fois la requête déposée, le président du tribunal de première instance statue sur base des pièces et de la demande, il prononce ensuite une ordonnance d'expulsion. Celle-ci est signifiée par voie d'huissier, à la personne à qui elle doit être signifiée. "Quand le cas survient, je dépose la requête le matin, et si le président est rapide, il prononce l'ordonnance l'après-midi. C'est rapide en général. Tout dépend de la taille du dossier. Si c'est très lourd, le président a besoin de plus de temps", a confié Me Terlinden.

Muni de l'ordre d'expulsion, l'huissier va donc rencontrer les gens du voyage pour leur signifier la décision du juge. "Dans ce cas, soit ils partent, soit ils restent. Mais s'ils ne coopèrent pas, c'est à ce moment que l'huissier peut demander l'intervention de la police, qui pourra utiliser la force pour évacuer le site", a ajouté l'avocat.

Dans ce cas précis, les gens du voyage sont systématiquement partis volontairement. Par contre, ils n'ont jamais payé les dégâts causés. "Dans un cas comme ça, ce sont des frais irrécupérables, car il n'y a personne à qui on peut les faire répercuter. On ne connaît par leur identité, et encore faut-il que ces personnes soient solvables…", a conclu Me Terlinden.


 

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