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Coup de gueule de Pierre: "On bloque bien les routes pour les cyclistes, mais pas pour les grenouilles!"

 
 

Ce mois de mars marque le début d'un merveilleux ballet naturel dans nos contrées, celui des batraciens qui migrent vers leurs lieux de ponte. Pour éviter qu'il ne se transforme en boucherie, des mesures sont prises un peu partout en Wallonie et à Bruxelles. Des bénévoles aident ces animaux à traverser nos routes de nuit, mais Pierre, un ex-bénévole, ne comprend pas pourquoi on ne bloque pas plus souvent les routes concernées. Sa commune, Braives, où une dame est décédée fauchée par un chauffard l'an dernier, lui répond.

"Les batraciens sont obligés de traverser nos routes durant leurs migrations nocturnes. Des équipes de bénévoles se mobilisent partout dans le pays pour aider ces amphibiens à franchir les obstacles que les hommes ont construits sur leur parcours. Ces bénévoles devraient être protégés contre les chauffards, par des dispositions communales qui réduisent voire interdisent la circulation automobile pendant cette courte période", nous a écrit Pierre Vignisse via notre page Alertez-nous. "Ce n'est pas le cas à Braives (entre Hannut et Huy, en province de Liège). Notre commune refuse de prendre des dispositions de protections pour ces bénévoles. Une d'elles est décédée le 18 mars 2013, fauchée par un chauffard qui a pris la fuite. Où sont les priorités?", se demandait-il.

 

Ses propres enfants ont failli être renversés

Contacté par la rédaction de RTLinfo.be, M. Vignisse nous a raconté son histoire. L’homme habite Hosdent, un "patelin de Latinne", sur la commune de Braives. L’endroit est "une zone qu’on appelle le pays du saule, là où forcément il y a des marais, donc des batraciens." Elle est située en plein Parc naturel des vallées de la Burdinale et de la Mehaigne, "un coin censé devenir touristique, en pleine nature". "Durant plusieurs années, j’ai été bénévole et je me suis occupé, avec mes enfants, de faire traverser les routes aux batraciens durant les nuits de fin d’hiver." Il lui est arrivé d’être témoin du comportement incivique de certains automobilistes. "Malgré une signalisation leur interdisant de rouler à plus de 30 km/h, j’ai déjà dû me planter au milieu de la route pour stopper un automobiliste qui refusait de ralentir. Vous savez, les enfants, quand ils repèrent une grenouille, ils foncent et oublient la route."

Une mère de famille mortellement fauchée l'an dernier

D’ailleurs, ce qui devait arriver arriva. C’était le 18 mars 2013. Viviane Nahon, une mère de famille de 52 ans qui participait au passage des batraciens rue de la Pompe, à Latinne, a été mortellement fauchée par un chauffard qui a pris la fuite et attend aujourd’hui son procès.

"Les chicanes ne servent à rien"

S’il ne participe plus aux actions, que vous pouvez retrouver sur le site batraciens.be -réalisé par le Service Public de Wallonie et Natagora pour protéger ceux-ci- M. Vignisse est resté en contact avec des groupes toujours actifs. "Leur dernier message m’a fait réagir. Je m’attendais à ce que cette année, après l’accident mortel, les routes soient totalement fermées. Mais ce n’est pas le cas", regrette-t-il. En effet, la commune de Braives a décidé d’installer dès le 15 mars une chicane temporaire faite de barrières nadar à l’entrée de la rue de la Pompe et d’une autre rue dangereuse ; et de placer des panneaux de signalisation sur 3 autres sites de passage des batraciens. Pas suffisant, selon notre témoin. Outre le fait que les batraciens sont en avance avec le beau temps que nous connaissons, "honnêtement, les chicanes ne servent à rien", estime M. Vignisse. "Si c’est une vraie chicane, rapprochée et qui empêche les voitures de couper en diagonale, alors ok. Mais avec 600 mètres de route, rien n’empêche les chauffards d’accélérer après."

Pourquoi Aywaille parvient à bloquer ses rues et pas les autres communes?

Pour lui, une seule solution: "Je crois que le mieux et le plus simple, c’est de fermer la route. On la bloque bien pour des courses cycliste de jour, alors que les bénévoles qui aident le font la nuit. Je ne vois pas ce qui les en empêche, à Braives ou dans n’importe quelle autre commune. D’autant que si les routes étaient fermées dans ces moments-là, les gens ne seraient plus obligés d’aider les batraciens à traverser, ils connaissent leur chemin ! Chez nous, le détour engendré par une déviation ne serait qu’un kilomètre plus long. Si Aywaille le fait, pourquoi n’est-ce pas possible ici ?"

Des routes importantes pour circuler entre les villages: impossible de les bloquer

A la commune de Braives, suite à l’accident mortel de l’année dernière, "le collège communal a été très attentif à cette problématique", nous a expliqué Thomas Laruelle, le directeur de l’administration communale. Il tenait cependant à rappeler que cet accident aurait pu arriver n’importe où, puisque le conducteur qui a mortellement fauché Mme Nahon était ivre. Pour rassurer la population, "il y a eu une réunion qui a été organisée" en ce début d’année. Etaient présents les organisateurs des actions, les riverains des rues concernées, les représentants communaux et des responsables de la Région wallonne, "qui a d’ailleurs édité une brochure sur les mesures à prendre dans laquelle il est bien spécifié qu’un blocage des routes n’est presque jamais conseillé". Lors de cette réunion, "il a été convenu de prendre comme mesures de protection l’installation de chicanes accompagnées de panneaux avertisseurs. Une solution qui agréait toutes les parties", rappelait M. Laruelle. Concrètement, la raison pour laquelle certaines routes de la commune ne sont pas bloquées est pragmatique: "C’est un problème de mobilité. Les routes concernées sont des liens de transit entre les différents villages. Les bloquer complètement aurait été impossible et le faire de façon aléatoire aurait également posé des problèmes aux riverains." En effet, si bloquer une route pour une course cycliste dure quelques heures une fois par an, bloquer régulièrement l'accès à un village durant des semaines est plus problématique.


 

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