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Chris revient d'Indonésie avec une carte SIM prépayée et constate qu'elle fonctionne en Belgique: "N'importe quel terroriste pourrait en faire autant"

Chris revient d'Indonésie avec une carte SIM prépayée et constate qu'elle fonctionne en Belgique: "N'importe quel terroriste pourrait en faire autant"
 
carte sim
 

Alors que la Belgique a contraint les opérateurs à exiger une pièce d'identité pour chaque carte SIM, qu'elle serve à un abonnement dit 'prepaid' ou 'postpaid', force est de constater que tous les pays du monde n'ont pas cette vigilance qui vise à surveiller les organisations criminelles ou terroristes.

Depuis quelques mois, pour lutter contre l'anonymat de la téléphonie mobile qui complique le travail de mise sur écoute de la police, les autorités ont forcé les opérateurs à lier chaque carte SIM à une identité.

C'était déjà le cas pour les abonnements postpaid (facture envoyée chaque mois après la signature d'un contrat, donc payés par après), mais pas encore pour les cartes prepaid (avec des recharges à effectuer manuellement, et donc payées à l'avance).

Les opérateurs ont dès lors dû effectuer un lourd travail d'encodage pour toutes les cartes prépayées en circulation, et ont dû désactiver toutes celles dont les propriétaires ne s'étaient pas manifestés.

Une bonne initiative pour la lutte contre la criminalité, mais est-ce vraiment impossible de téléphoner, envoyer des SMS et utiliser l'internet mobile en Belgique de manière anonyme ? Pas vraiment, hélas, comme l'a constaté Chris, qui a contacté la rédaction de RTL info via le bouton orange Alertez-nous.


Il rentre d'Indonésie et… il peut téléphoner

De février 2016 à juin 2017, Chris, un Bruxellois de 45 ans, était en Indonésie pour le travail. "Sur place, j'avais acheté une carte prépayée à environ 21 euros, avec 20 euros d'appel. Ça ne coûte vraiment pas cher, les communications, sur place", nous a-t-il expliqué.

Et le tout, "de manière totalement anonyme, il ne faut pas donner son identité pour en acheter une, là-bas".

Lorsqu'il est rentré au pays, l'été dernier, notre témoin a constaté que son téléphone équipé de sa carte SIM indonésienne captait du réseau. "Elle était toujours active, elle n'était pas du tout bloquée, je pouvais téléphoner ou envoyer des messages".


Une carte SIM ne contient que des numéros

Un constat logique: votre carte SIM contient principalement des données d'identification (opérateur, pays, numéro d'identifiant de l'abonné). C'est votre téléphone qui est compatible ou non avec les fréquences des antennes GSM disponibles.

Ce sont ces antennes qui varient parfois d'une région à l'autre, bien qu'une certaine uniformisation soit en cours, car Huawei, devenu N.1 en quelques années, installe son matériel de télécommunication (antennes, relais, switch, etc) partout dans le monde.

Donc, a priori, il n'y a aucune raison pour qu'une carte SIM ne soit pas utilisable partout dans le monde. Au contraire, cela arrange bien les opérateurs qui peuvent décupler les tarifs et donc faire exploser les factures ou les rythme de recharge.


"Ça me fait peur"

Chris était plutôt étonné de la situation. "En Belgique et en France (où il a passé une partie de l'été, NDLR), il faut montrer un passeport ou une carte d'identité pour acheter une carte SIM, même prépayée. Mais si t'achètes une carte SIM en Indonésie, elle fonctionne de manière totalement anonyme chez nous".

Bien entendu, les communications sont facturées au tarif international, et le crédit disponible diminue très rapidement. "Mais si c'est pour des SMS, ce n'est pas très cher, il y a moyen de tenir longtemps", précise-t-il.

Selon lui, "avec 200€, des bandits ou des terroristes peuvent acheter 10 cartes SIM anonymes et les utiliser en Belgique… ça me fait peur", conclut-il.

La police a-t-elle constaté des changements depuis la fin de l'anonymat ?

La Police fédérale était demandeuse de la fin de l'anonymat des cartes prépayées disponibles en Belgique, et avec des tarifs belges. "C'est une mesure indispensable qui porte ses fruits", nous a expliqué Sandra Eyschen, porte-parole. Et les effets positifs sont concrets. "Oui, on a constaté des résolutions plus rapides de problèmes". 

Concernant les grands dossiers, par exemple le suivi des cellules terroristes, la Police "identifie plus facilement les familles, les proches, en analysant les numéros entrants". Ce qui permet à termes de mettre à jour des réseaux plus facilement. 

Mais la Police n'est pas naïve. "Les criminels ont changé leur comportement, il y a toujours une adaptation". Ils ne communiquent sans doute plus d'informations sensibles via des appels vocaux ou des SMS, mais via des services de messagerie cryptées, comme Telegram et même WhatsApp. Et à ce niveau-là, la justice a nettement plus de mal à suivre leurs conversations...

La porte-parole conclut en disant que"si tous les pays du monde faisaient ça", ce serait nettement mieux, confirmant qu'il y avait encore "beaucoup de pays où l'on pouvait se procurer une carte SIM anonymement"


Conclusion: même l'Europe n'a pas encore contraint tous ses membres

Si l'on peut difficilement contester le fait que les cartes SIM soient utilisables à l'étranger (car elles devraient l'être pour tout le monde, y compris le Belge qui part en Indonésie et pas uniquement l'Indonésien qui part en Belgique…), on peut regretter que le monde entier n'ait pas encore exigé une pièce d'identité pour la lier à n'importe quelle carte SIM…

Comme nous le mentionnons dans cet article de 2016, seuls 80 pays dans le monde demandent une pièce d'identité pour l'achat d'une carte prépayée. Même l'Europe n'a pas encore contraint tous ses pays membres à le faire. On peut donc toujours rêver que la Chine et les Etats-Unis se mettent d'accord à ce sujet…

Heureusement que le prix de l'utilisation de son smartphone à l'autre bout du monde est encore tellement élevé (parfois jusqu'à plusieurs euros par minute, voire 15€ pour un MB d'internet mobile) qu'il sert de frein naturel…


 

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