En ce moment
 
 

"Thelma": un thriller surnaturel à la sauce norvégienne

"Thelma": un thriller surnaturel à la sauce norvégienne
Le réalisateur norvégien Joachim Trier, le 11 novembre 2017 à HollywoodKEVIN WINTER
 
 

Remarqué avec le très mélancolique "Oslo, 31 août", le Norvégien Joachim Trier s'essaie au film de genre avec "Thelma", un thriller surnaturel "sans tripes, ni hémoglobine" évoquant une jeune fille élevée dans un milieu rigoriste et se découvrant des pouvoirs occultes.

"Je n'avais pas envie de tripes et de sang, ou d'un film d'horreur avec des monstres", explique Trier qui, pour son quatrième long métrage, voulait un film très "visuel" comparable à un cauchemar.

Dès la première scène, le ton est posé: un père et sa fille partent chasser dans un paysage enneigé quand l'homme tourne son fusil vers l'enfant, prêt à tirer, avant de se résigner. Un préambule glaçant.

Le film redémarre ensuite avec l'arrivée à l'université de Thelma, jeune fille timide, élevée par des parents dévots de l'ouest de la Norvège.

Alors qu'elle tente de se faire des amis et de se rapprocher de la populaire Anja, elle est prise de convulsions proches de l'épilepsie. Les crises vont se multiplier et se faire de plus en plus violentes, obligeant la jeune fille à chercher le mal qui l'habite.

D'une grande virtuosité, "Thelma" offre de superbes scènes fantasmatiques, dont une très impressionnante avec un serpent ou une autre dans une piscine. Dans une autre séquence, un vol de corbeaux venant s'écraser sur une fenêtre symbolise l'arrivée d'un malheur.

Né dans les années 70, la réalisateur a puisé son inspiration dans les films de sa jeunesse, ceux de Brian De Palma (dont "Carrie, au bal du diable", auquel on compare beaucoup "Thelma") et de David Cronenberg ("Dead zone"), qui ont tous deux adapté des romans du maître du fantastique Stephen King.

Si l'esthétique est différente, l'ambition est la même: "raconter une histoire très humaine mais en même temps allégorique, grâce au fantastique", explique le réalisateur qui s'est également inspiré des histoires de sorcières répandues en Norvège.

- Regard masculin ? -

"L'idée de départ était de travailler sur la perte de contrôle. Le film est sur ce que nous nous interdisons", poursuit-il. "Et comme +Oslo, 31 août+, (sur un ancien drogué qui peine à retrouver ses marques, ndlr), c'est un film sur un personnage qui ne sait pas s'intégrer", indique celui qui travaille avec le coscénariste Eskil Vogt depuis ses débuts.

Portrait d'une jeune femme à "l'inquiétante étrangeté", "Thelma" est portée par l'interprétation d'Elli Harboe (22 ans au moment du tournage) et de Kaya Wilkins, dont c'est la première apparition à l'écran.

L'alchimie est palpable entre ces deux jeunes femmes, amoureuses dans le film. Interrogé sur la manière de filmer deux femmes et des scènes sensuelles, Joachim Trier plaide la collaboration avec ses actrices. "Je suis bien conscient des problématiques d'avoir un +regard masculin+ mais j'essaie d'être respectueux et de collaborer avec les actrices".

"A vrai dire, je ne vois pas trop de différence entre un personnage masculin ou féminin. Etre un homme ou une femme est une partie d'un individu mais ne le résume pas", poursuit cet admirateur de la réalisatrice Claire Denis et de sa façon de filmer des personnages, tous sexes confondus.

Interrogé sur d'éventuelles répercussions de l'affaire Weinstein, le réalisateur confirme que "les choses bougent" en Norvège et qu'il parle énormément avec ses confrères des pratiques dans le 7e art. "Pas question de faire passer des castings le soir", insiste le quadra.

"Faisons passer des essais le jour pour ne pas créer de moments bizarres pour de jeunes acteurs. Sinon, nous risquons de laisser passer le train", conclut celui qui travaille déjà à un autre projet: un documentaire sur le peintre Edvard Munch, qu'il coréalise avec son frère, Emil.


 

Vos commentaires