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En Corse, les nationalistes en campagne pour "construire un pays"

En Corse, les nationalistes en campagne pour "construire un pays"
Le président sortant de l'exécutif corse Gilles Simeoni, le 20 novembre 2017 à Olivese, en Corse-du-SudPASCAL POCHARD-CASABIANCA
 
 

Dans ce petit village de la montagne corse, pas de grand rassemblement ou d'opération de tractage: c'est autour d'une assiette de coppa ou de figatelli que le président sortant de l'exécutif corse Gilles Simeoni lance sa campagne pour les élections des 3 et 10 décembre.

A la tête de la liste "Un paese da fa" ("Un pays à construire") construite notamment autour de son mouvement autonomiste Femu a Corsica et du parti indépendantiste Corsica Libera de Jean-Guy Talamoni, il a choisi de parcourir le Taravo, au sud-est d'Ajaccio, au premier jour de cette campagne-éclair. Dans cette région où cochons noirs et chèvres s'invitent régulièrement sur les routes tortueuses, 4 habitants sur 10 ont plus de 60 ans, selon l'Insee.

"Nous tenons à être présents physiquement dans les villages de l'intérieur, même si leur poids économique ou électoral est faible. Réussir la relance et la revitalisation de ces zones, c'est un enjeu politique prioritaire", explique-t-il à l'AFP. A Olivese, un de ces bourgs pourtant désertés en hiver, perché au-dessus de vallées verdoyantes, Gilles Simeoni, venu avec d'autres candidats de sa liste, est accueilli par des dizaines de sympathisants.

L'ancien maire de Bastia, dans un élégant costume bleu nuit, salue un à un, en langue corse, des hommes en treillis et béret. "Le premier tour est fondamental", assure Gilles Simeoni à l'assemblée attentive, "car la tentation de nos opposants de se mettre tous ensemble contre nous est encouragée par Paris".

Le discours fait mouche dans ce village reculé où un tag "FLNC" orne un mur à une vingtaine de 20 mètres de l'église. "S'ils font un gros score, l'Etat va enfin être obligé de les écouter", commente un habitant de la région, entrepreneur dans le BTP: "Comment des gens à Paris ou à Bruxelles peuvent-ils décider quoi que ce soit de ce qui se passe en Corse ?"

- "Une autre étape" -

Deux ans après leur victoire aux régionales et six mois après l'élection de trois députés nationalistes à l'Assemblée nationale, la liste de Gilles Simeoni et Jean-Guy Talamoni apparaît favorite du scrutin qui doit donner naissance à la Collectivité unique (CTU) qui remplacera les deux conseils départementaux de Haute-Corse et de Corse-du-Sud et la collectivité territoriale (CTC).

Sept autres listes, dont une portée par les indépendantistes plus radicaux de U Rinnovu, ont été déposées en préfecture. Les écologistes ont déjà annoncé leur retrait, faute d'avoir pu boucler un budget.

Surfant sur une vague de succès depuis 2014 et l'accession de Gilles Simeoni à la mairie de Bastia, les nationalistes sont conscients de ratisser aujourd'hui plus large que leur seul électorat de base. C'est en partie pour cette raison que l'alliance des autonomistes modérés de Femu a Corsica avec les indépendantistes de Corsica Libera n'était pas une évidence.

Aujourd'hui, Gilles Simeoni balaie la question: "Nous avons voulu aller ensemble vers les Corses dès le premier tour, d’abord parce que nous avons été élus ensemble, et nous avons gouverné ensemble depuis deux ans".

Dans son programme en 10 points, la coalition nationaliste se prononce pour "une autonomie de plein droit et de plein exercice, avec pouvoir législatif, réglementaire, et fiscal", d'ici 10 ans. "La question de la violence est définitivement réglée, nous sommes dans une autre étape de notre histoire", résume devant les habitants d'Olivese Jean-Christophe Angelini, secrétaire général du Parti de la nation corse et troisième sur la liste "Un paese da fa".

"Dans les années à venir, les Corses seront libres de se déterminer et bien entendu nous n’irons jamais (...) contre la volonté des Corses", renchérit Josepha Giacometti, élue Corsica Libera à l'Assemblée de Corse. Et si la jeune indépendantiste assure que la trajectoire des "frères catalans" procède d'une histoire bien différente, elle n'oublie pas de rappeler qu'il y a peu de temps encore, "certains qualifiaient d'utopie l'accession des nationalistes corses au pouvoir…".


 

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