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Russie: commémorations modestes pour le centenaire de la Révolution

 
 

La Russie a commémoré mardi sans éclat les cent ans de la Révolution bolchévique d'Octobre, séisme politique majeur du XXe siècle, le Kremlin craignant une glorification du changement de régime par la force.

Si l'anniversaire de la Révolution était célébré en grande pompe pendant la période soviétique, avec un grand défilé sur la Place Rouge tous les 7 novembre, le programme officiel s'est contenté aujourd'hui très modestement d'expositions et de colloques entre spécialistes.

Un défilé a bien eu lieu mardi sur la Place Rouge, mais il s'agissait de la reconstitution en uniformes d'époque de la parade de 1941 lors de la bataille de Moscou, en pleine Seconde guerre mondiale, quand les soldats sont partis directement de la Place Rouge au front.

Et les rares commémorations impliquant le grand public ont été pour les autorités l'occasion de mettre l'accent sur l'importance de l'unité nationale et de la réconciliation, en évitant d'évoquer les sujets sensibles.

Le Parti communiste, qui reste le plus grand parti d'opposition au Parlement russe, a pour sa part réuni des milliers de ses partisans pour un défilé au centre de Moscou avec des drapeaux rouges, des portraits de Marx, de Lénine et de Staline.

Dans le défilé, auquel ont participé des délégations en provenance d'Italie, de Colombie et d'autres pays, certains brandissaient des pancartes avec le slogan de 1917 "Tout le pouvoir aux Soviets!" ou une maquette du croiseur légendaire Aurore dont un coup de canon a donné le signal de l'assaut sur le Palais d'Hiver, marquant le début de la Révolution.

"La Révolution d'Octobre m'a tout donné", a déclaré à l'AFP l'un des manifestants, un militaire à la retraite, Nikolaï Korotkov, 85 ans. "Elle m'a éduqué et m'a élevé", assure-t-il.

Le mouvement de gauche nationaliste Autre Russie, mené par l'écrivain Edouard Limonov, a pour sa part réuni à Moscou entre 500 et 700 de ses partisans, parmi lesquels beaucoup de jeunes, pour une manifestation autorisée par les autorités. Une vingtaine de ses partisans avaient été arrêtés lundi par la police à Saint-Pétersbourg.

- 'Nous vous envions!' -

La Russie a également ouvert mardi dans tout le pays des capsules enterrées il y a cinquante ans et chargées de poignants messages de leurs aïeux soviétiques.

Nombre de messages, écrits pour la plupart à l'occasion du 50ème anniversaire de la Révolution en 1967, décrivent avec une grande confiance dans l'avenir les triomphes supposés de leurs futurs "camarades" soviétiques, tels que l'envoi d'un homme sur Mars.

"Nous vous envions un peu! La jeune génération du futur communiste!", indique ainsi un texte rédigé en 1967.

Très peu de journaux russes ont choisi mardi de titrer sur l'anniversaire de la Révolution, se contentant du rappels de cet événement historique ou de commentaires d'historiens. "Grande célébration ou grande tragédie?", écrit en Une le tabloïd populaire Komsomolskaïa Pravda.

Vladimir Poutine a soigneusement évité la plupart des événements organisés pour le centenaire, y compris un spectacle lumineux en 3D projeté ce week-end sur la façade du Palais d'Hiver dans sa ville natale, Saint-Pétersbourg.

L'un des seuls événements liés aux commémorations auquel M. Poutine a participé a été l'ouverture d'une nouvelle église à Moscou, qu'il a qualifié de "profondément symbolique" alors que l'arrivée au pouvoir des communistes en 1917 a mené à la persécution du clergé et des croyants.

Fin octobre, M. Poutine a également inauguré un mémorial en hommage aux victimes des répressions politiques, assurant vouloir ainsi "tirer un trait" sur les divisions du passé.

La Révolution est "une partie intégrante et complexe de notre histoire", qui doit "être traitée objectivement et avec respect", a déclaré en novembre M. Poutine qui s'est efforcé, dès son arrivée au pouvoir, de réconcilier la société et la mémoire nationale.

- 'Tirer des leçons' -

Pour le Kremlin, les commémorations de la Révolution doivent servir à "tirer des leçons" du passé. Et ces "leçons à tirer" sont claires: il s'agit de se prémunir contre toute velléité de contestation du pouvoir par la rue, surtout à quelques mois de l'élection présidentielle de mars 2018 à laquelle personne ne doute que M. Poutine se représentera pour un quatrième mandat.

La moindre forme de contestation est immédiatement diabolisée par le pouvoir, qui voit en tout mouvement de protestation sociale ou politique l'oeuvre de forces "antipatriotiques" plus ou moins liées à l'étranger.

La police russe a ainsi arrêté pendant le week-end des centaines de manifestants anti-Poutine descendus dans la rue à l'appel d'un opposant radical en exil, ainsi que des dizaines de membres de groupuscules nationalistes.


 

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