En ce moment
 
 

En pleine croissance, l'Allemagne priée de dépenser plus

En pleine croissance, l'Allemagne priée de dépenser plus
Le produit intérieur brut (PIB) allemand a augmenté de 0,8% au troisième trimestreCHRISTOF STACHE
 
 

L'Allemagne attend toujours son nouveau gouvernement, mais lui assure déjà des caisses pleines: la solide croissance du troisième trimestre, annoncée mardi, vient nourrir le débat allemand et européen sur les dépenses de la future coalition.

"Vous ne vous lassez jamais des bonnes nouvelles? Alors regardez les dernières données sur le PIB allemand", écrit l'économiste Carsten Brzeski, résumant le sentiment de ses confrères face au "cycle doré" de la première économie européenne.

La croissance économique allemande a accéléré au troisième trimestre, avec une progression du produit intérieur brut (PIB) de 0,8%, selon l'office fédéral des statistiques Destatis. Cette croissance est meilleure que le +0,6% attendu par les analystes.

Ce chiffre de 0,8%, provisoire et corrigé des variations saisonnières, suit une augmentation du PIB de 0,6% au deuxième trimestre et de 0,9% au premier trimestre, révisée en hausse pour la deuxième fois.

"L’Allemagne connaît un second printemps", constate Jörg Krämer, de Commerzbank, d'autant plus frappant qu'il repose à la fois sur le commerce extérieur, les dépenses des ménages et de l’État et une poussée des investissements, en particulier dans les équipements.

Le gouvernement avait fortement relevé ses prévisions de croissance à la mi-octobre, tablant alors sur 2% en 2017 (contre 1,5% prévu auparavant) et 1,9% en 2018, mais la plupart des estimations des économistes se situent au-delà.

- 'Perspectives radieuses' -

"Même si l'économie devait stagner au dernier trimestre, la croissance du PIB s'élèverait quand même à 2,4% pour l'année, soit le plus haut niveau depuis 2011", calcule Carsten Brzeski.

À moyen terme, l'optimisme des observateurs s'appuie sur les dépenses réalisées par les entreprises pour accroître leurs capacités de production, ainsi que sur l'euro faible, favorable aux exportations, et le chômage historiquement bas.

L'inflation toujours modérée, confirmée ce mardi à 1,6% en octobre sur un an, devrait par ailleurs inciter la Banque centrale européenne à conserver des conditions de financement favorables.

Enfin, les indicateurs avancés dessinent des "perspectives radieuses" pour plusieurs années, avec des baromètres de confiance élevés pour les industriels comme pour les consommateurs, souligne Jennifer McKeown, de Capital Economics.

Mais la question est de savoir ce que le futur gouvernement va faire de cette prospérité, alors que les conservateurs de la chancelière Angela Merkel, les Libéraux et les Verts sont engagés dans d'épineuses tractations pour former une coalition.

Le retour à l'équilibre budgétaire, Graal de la précédente législature décroché depuis 2014, ne suffit plus à contenter les acteurs de l'économie allemande comme les partenaires européens de l'Allemagne, qui la prient de délier les cordons de la bourse pour stimuler leur propre croissance.

- Préparer l'avenir -

"Pendant que tout va bien côté conjoncture, on voit pointer les problèmes structurels", l'Allemagne perdant en attractivité à cause "des infrastructures de transport, de l'imposition des sociétés et de l'offre de main d’œuvre qualifiée", avertit Martin Wansleben, patron de la Chambre allemande du commerce et de l'industrie DIHK.

Pour lui, le gouvernement attendu au plus tôt à Noël devra "en priorité" investir dans "une infrastructure moderne et des têtes pleines", tout en allégeant la fiscalité des entreprises.

Les "Sages", un forum d'influents économistes conseillant le gouvernement allemand, énuméraient de leur côté jeudi dernier les investissements "d'avenir": grand plan de numérisation, mise aux normes énergétiques des bâtiments publics, incitations fiscales pour la recherche et le développement.

"Les dépenses du gouvernement devraient augmenter substantiellement", pronostiquent Holger Schmieding et Florian Hense, de la banque Berenberg: il faudra en effet "satisfaire quelques promesses électorales" dans trois camps à la fois, un attelage inédit au niveau fédéral.

Mais Ferdinand Fichtner, de l'institut de recherche berlinois DIW, redoute que la future "coalition Jamaïque", traversée de profondes divisions, ne peine à accoucher d'une politique cohérente.

Les futurs partenaires "ont l'air bien plus disposés à dilapider les marges de manœuvre financières qu'à les investir dans l'avenir de l'Allemagne", déplore-t-il.


 

Vos commentaires