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Une exposition virtuelle révèle les plus profonds détails de "Guernica"

Une exposition virtuelle révèle les plus profonds détails de "Guernica"
Un homme photographie une réplique du Guernica de Pablo Picasso, à Guernica, le 26 avril 2017ANDER GILLENEA
 
 

Symbole pacifiste peint sur des murs à travers le monde, le "Guernica" de Picasso est aujourd'hui l'objet d'une exposition virtuelle du musée Reina Sofia, utilisant la technologie informatique et des documents inédits liés à l'emblématique tableau.

"Guernica est une source infinie de matériel artistique et c'est un privilège de l'avoir en tant qu'historienne de l'art", déclare à l'AFP Rosario Peiro, chargée des collections au musée d'art contemporain de Madrid où est exposé le tableau.

Elle fait partie de l'équipe de l'exposition interactive consacrée au chef-d'oeuvre de l'Espagnol, inaugurée le 13 novembre et intitulée "Repenser Guernica". (//guernica.museoreinasofia.es/)

"Mettre tout cela ensemble vous permet de repenser l'histoire du tableau", confie-t-elle à l'AFP.

"Guernica" dépeint le bombardement de cette petite ville du Pays basque, au nord de l'Espagne, le 26 avril 1937, par l'aviation allemande et italienne, qui appuyaient le soulèvement du général Francisco Franco pendant la guerre civile espagnole (1936-1939).

Le bombardement, l'un des premiers dirigés contre les populations civiles, avait fait des centaines de morts et choqué dans le monde entier.

Picasso, réfugié en France, avait reçu une commande du gouvernement de la République espagnole d'un tableau qui transmette l'horreur du bombardement pour l'Exposition universelle de 1937 à Paris.

- Histoire mouvementée -

Le texte de la commande fait partie des centaines de documents inédits autour du tableau mis au jour par cette exposition.

Ils permettent de retracer les nombreux voyages de l'oeuvre, en Scandinavie, au Royaume-Uni, et même brièvement au Venezuela en 1948, avant qu'un coup d'Etat ne le chasse du pays sud-américain.

Parmi ces documents, un télégramme d'Alfred H. Barr, directeur des collections du Musée d'arts modernes (MoMA) de New York où le tableau a été exposé pendant des décennies, qui informait le maître espagnol que ses oeuvres n'avaient pas souffert d'un incendie dans le musée en 1958.

"C'est clairement un tableau politique car c'est une commande d'un gouvernement dans un but de propagande", commente Rosario Peiro.

Mais "pendant toutes ces années passées à voyager d'un endroit à l'autre, l'oeuvre a été dépolitisée", estime-t-elle.

Le document le plus massif de cette exposition est une reconstitution virtuelle du tableau en très haute définition, d'un poids de 436 gigabytes.

Pour le constituer, des chercheurs ont utilisé des milliers d'images prises avec de la lumière infrarouge et ultraviolette et même à l'aide de rayons X.

Cela permet de voir les détails les plus infimes du tableau de près de huit mètres de long, comme des poils de pinceau toujours collés ou les restes d'un acte de vandalisme en 1974, à peine visibles même d'aussi près.

"Pour moi, ce qui est intéressant à voir, c'est la géographie du tableau, sa surface. C'est comme une carte historique", explique Rosario Peiro.

- Nouvelles perspectives -

Le musée Reina Sofia expose actuellement des dizaines de photos de guerre en noir et blanc auprès du "Guernica".

Des critiques ont assuré que les photos ont joué un rôle dans l'absence de couleur dans le tableau en noir, blanc et gris, alors que le peintre cubiste était habitué aux oeuvres très colorées.

Beaucoup des photos exposées au Reina Sofia sont l'oeuvre du fameux photographe catalan Agusti Centelles.

"Nous montrons beaucoup de photos de Barcelone, mais c'est parce que le meilleur photojournaliste espagnol de l'époque était catalan", se justifie Rosario Peiro, alors que la Catalogne avec une tentative de sécession a été cet automne au coeur de la pire crise politique qu'ait connu l'Espagne en 40 ans.

Elle dit espérer que ce nouveau projet ouvrira de nouvelles perspectives pour l'une des oeuvres les plus marquantes du XXe siècle.

"Guernica est l'oeuvre la plus importante, physiquement et symboliquement, pour le musée, donc nous devons continuer à travailler dessus", dit-elle. "C'est le moins qu'on puisse faire."


 

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