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Trans Musicales: la méthode Brossard

Trans Musicales: la méthode Brossard
Jean-Louis Brossard pose lors des 37e "Trans Musicales" de Rennes, le 4 décembre 2015JEAN-FRANCOIS MONIER
 
 

Dénicher les Bjork, Etienne Daho, Nirvana, Portishead ou Stromae de demain: Jean-Louis Brossard, cofondateur et inlassable tête chercheuse des Trans Musicales de Rennes depuis près de 40 ans, lève un coin de voile sur sa méthode.

- Les jambes -

"Dès qu'une édition se termine, j'ai souvent des pistes déjà prêtes à explorer pour la suivante", sourit Jean-Louis Brossard, qui s'en veut déjà d'en avoir trop dit.

La préparation des "Trans" s'opère d'abord en baroudeur. "Je ne connais pas vraiment de phase de repos. Généralement, je me mets vite à écouter des choses dans la perspective de la prochaine édition. Et puis dès janvier, je pars à l'Eurosonic aux Pays-Bas".

400 groupes, pour la plupart inconnus, se produisent pendant dans le festival de Groningen. "Je vais aussi en mai au Great Escape à Brighton", dit celui qui n'oublie jamais de sillonner les routes bretonnes pour vérifier la bonne santé musicale locale.

Aller dans ces festivals, dont l'ADN cousine avec celui des Trans Musicales, "permet d'y faire plein de rencontres. Des gens qui travaillent au bureau export, des artistes, des labels. Mais le plus important, c'est de voir ce que donnent les groupes sur scène".

- L'oreille et l'oeil -

Dans son bureau, entouré par plus de 20.000 disques vinyles, Jean-Louis Brossard est tout aussi actif.

"Je peux booker un groupe sans l'avoir vu sur scène, dit-il. Le Sud-Africain Nakhane en est un exemple. Et pourtant je lui confie cette année +la création+, une résidence pour 5 soirs. Personne ne l'a vu sur scène. Comme lui, il y a plein d'artistes comme lui qui n'ont encore jamais joué en concert."

Comment dans ces conditions se laisser convaincre? "C'est simple: le son va souvent me décider. Parfois, l'image aussi. Pour les Anglais de HMLTD l'an passé, j'avais vu une vidéo. Leur musique me parlait mais leur attitude me plaisait surtout. Ils avaient du charisme, ça se sentait. Il ne me faut pas grand chose de plus pour avoir un coup de foudre".

- L'index -

Si pendant une trentaine d'années Jean-Louis Brossard s'est nourri de disques vinyles, de cassettes audios, puis de cds, c'est désormais le web qui l'alimente.

"Maintenant, j'ai des tourneurs qui m'envoient 20 liens différents sur 20 groupes. Ce n'est pas évident à écouter. Ce n'est pas un objet qu'on tient entre les mains, qu'on peut ressentir", dit-il avec une pointe de regret.

Le streaming change la façon de consommer de la musique. Les artistes qui débutent ne proposent pour beaucoup que des morceaux à télécharger.

"Mais internet ça permet d'aller vite, reconnaît Brossard. On peut d'un clic sauter du début à la fin d'un morceau. Et puis on peut y voir des vidéos, des lives, des choses auxquelles on n'avait pas accès jusqu'alors. C'est un outil super intéressant."

- Les antennes -

Les sources d'informations de Jean-Louis Brossard sont innombrables, à force d'accueillir la musique du monde depuis 39 éditions et d'aller à sa rencontre. Son réseau est très vaste.

"Certaines personnes qui me connaissent bien savent que je peux tout programmer. Les Japonais Oki Dub Ainu Band, qui chantent en aïnou (la langue traditionnelle de l'île d'Hokkaïdo) et qu'on invite cette année, c'est un tourneur qui les a vus en Australie. Il s'est dit que ça devrait me plaire. Il ne s'est pas trompé. Ce genre de tuyau tient à la confiance mutuelle instaurée avec les années".

"Tous ces gens sont aussi mes ambassadeurs. Ils savent que les +Trans+ c'est fait pour le développement d'un artiste. Ils savent expliquer à un groupe qui ne nous connaît pas ce qu'on représente, que c'est important de le faire pour être découvert par de nombreux professionnels et journalistes.

"Mon rêve c'est d'avoir des artistes de tous les pays du monde, j'en ai eu de plus de la moitié", affirme Brossard, fier d'avoir épinglé l'Indonésie (Bottlesmokers) et la Syrie (Psychaleppo) cette année à son planisphère.


 

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