En ce moment
 
 

"Le Brio" d'Yvan Attal: "cette histoire est la mienne"

"Le Brio" d'Yvan Attal: "cette histoire est la mienne"
Le réalisateur Yvan Attal (d) et sa compagne Charlotte Gainsbourg, le 21 mai 2017 à Cannes Valery HACHE
 
 

Pour "Le Brio", son cinquième long métrage en salles mercredi, Yvan Attal plonge dans les cités de son enfance à Créteil et signe une comédie à thèse, où une jeune fille issue de l'immigration algérienne, Neila Salah, franchit tous les obstacles pour devenir brillante avocate à travers un concours d'éloquence.

Après "Ma femme est une actrice" (avec sa compagne Charlotte Gainsbourg), ou encore "Ils sont partout", sur les clichés antisémites, l'acteur - réalisateur poursuit dans la veine introspective: "Cette histoire, c'est la mienne en fait. Je suis issu d'une famille d'Algérie, pas musulmane (de juifs séfarades, ndlr) qui arrive d'Algérie après l'indépendance avec rien", constate-t-il.

"J'ai grandi dans une cité à Créteil à côte de la cité où on a tourné. Mes parents ne m'ont pas donné des livres à lire, ne m'ont pas amené à l'opéra et pour reprendre les dialogues du film, je n'ai pas eu la chance de faire du solfège et du char à voile à l'Ile de Ré. Pour des raisons mystérieuses j'ai eu envie d'être acteur, je me suis inscrit dans un cours de théâtre et là je suis tombé sur un professeur qui m'a fait découvrir Molière, Marivaux, Musset, Shakespeare et les autres. Et aujourd'hui, grâce à lui, je suis acteur et réalisateur."

De ce parcours, Yvan Attal tire la conclusion que "tout est possible, même si on est à une autre époque, qu'il y a des difficultés supplémentaires, même si on porte un nom qui est difficile à porter pour certains". "On ne peut pas toujours brandir la carte de la discrimination toute la journée. Il faut se bouger le cul", lance-t-il.

Message transparent, dans cette comédie qui doit tout son charme aux performances de Daniel Auteuil en vieux prof réac, et surtout de Camélia Jordana, dont le parcours semble étayer la démonstration du film: la jeune chanteuse d'origine algérienne révélée par "La Nouvelle star" connaît un début de carrière plus que prometteur dans la chanson comme au cinéma.

Camélia Jordana sait à merveille faire ressentir au spectateur l'humiliation ressentie par Neïla, brutalement interpellée par le professeur Pierre Mazard en plein amphi de droit à Assas où elle arrive en retard le jour de la rentrée. "Typique", lance le vieux maître, hué par les étudiants qui le traitent de raciste.

- "C'est un film chauvin" -

Pour Yvan Attal, Mazard "n'est pas raciste, c'est un provocateur, c'est quelqu'un qui nous sort de notre zone de confort, même s'il dérape, évidemment, comme ces intellectuels qui pour nous démontrer une idée vont un peu trop loin mais peut-être que l'intention n'était pas mauvaise".

Le film raconte donc une rencontre entre deux êtres que tout sépare: le professeur provocateur à la Houellebecq, toujours sur le point de "déraper", et la jeune Neïla que tout à la fac renvoie à sa condition de fille de l'immigration et de banlieusarde, jusqu'au vigile noir à l'entrée qui lui réclame systématiquement sa carte d'étudiante.

Mazard, acculé au conseil de discipline pour ses écarts de langage, accepte pour se couvrir de former Neïla au concours d'éloquence annuel et c'est l'occasion de scènes savoureuses et d'un bel hommage à la littérature.

"C'est un film chauvin, on fait référence au patrimoine culturel, à nos auteurs", revendique Yvan Attal. Il place d'ailleurs en début de film de courts extraits de Jacques Brel, Serge Gainsbourg, Claude Lévi-Strauss et Romain Gary, pour qui "la France est le plus beau pays du monde", en appui de sa démonstration.

"Attention, je n'ai pas voulu asséner de message avec ce film, j'ai voulu raconter une histoire où les gens rigolent, sont émus, et que si possible certains sujets émergent entre les lignes", dit le réalisateur. Difficile pourtant de ne pas voir dans le film une leçon d’assimilation appuyée en direction d'une "certaine jeunesse qui ne se remet pas en question".


 

Vos commentaires